Voici le blog pédagogique de M. Cros.
Vous y trouverez des infos sur l'Antiquité et des pistes pour le latin.

dimanche 19 juillet 2009

Le théâtre–amphithéâtre gallo-romain de Lillebonne


Cet édifice de spectacle est exceptionnel à la fois par son plan — un hémicycle légèrement outrepassé — par sa taille et la qualité de sa construction, et enfin par son état de conservation.

Le théâtre de Lillebonne est un édifice mixte caractéristique de la Gaule du Nord et du Centre. Sa structure architecturale combine des éléments spécifiques à deux types d'édifices.
L’arène de forme elliptique correspond à l'amphithéâtre construit au Ier siècle, et les gradins (« cavea ») en hémicycle édifiés au IIe siècle marquent la transformation du site en théâtre. L’étude des techniques de construction révèle la réalisation de travaux de rénovation, d’agrandissement et d’embellissement du théâtre à la fin du IIe siècle et au début du IIIe siècle, une époque correspondant à la prospérité de Juliobona.
Au IIIe siècle, il est intégré dans un ensemble de fortifications, le castrum, quand les invasions barbares obligent la population à se réfugier dans l'édifice. Il a servi d’habitation dès l’Antiquité tardive et pendant le Moyen-Age puis fut abandonné et ses pierres réutilisées.
Redécouvert dès le XVIIIe siècle, il a été acheté au XIXe siècle par le département de Seine-Inférieure puis progressivement dégagé.

Sa plus grande longueur est d’environ 112 mètres.
Sa hauteur devait avoisiner les 19 mètres, soit 7 mètres de plus que ce qui est conservé. Il pouvait accueillir 10 000 spectateurs, venus de Juliobona mais aussi de toutes les campagnes environnantes, car les spectacles étaient un élément fédérateur pour les différents peuples gallo-romains.

De très nombreux éléments trouvés aux cours des fouilles successives montrent la qualité et la richesse de son décor : marbres, enduits peints, éléments lapidaires sculptés...
Actuellement, un programme de réhabilitation est en cours. Il prévoit d’étudier le monument par des fouilles archéologiques et de restaurer les parties les plus fragiles pour pouvoir à nouveau l’ouvrir au public.

dimanche 5 juillet 2009

Les Gaulois face à Rome

La Normandie entre deux mondes
Cette exposition, qui durera tout l'été jusqu'au 21 septembre, fait le point sur les découvertes archéologiques récentes en Normandie, concernant aussi bien l'Age de fer que la période romaine.
Il est vrai que la connaissance de la société gauloise s'est vue transformée ces dernières années. On est loin des visions simplificatrices du XIXe siècle, popularisées par Astérix !
Comme le titre l'indique, l'exposition présente la phase de transition entre la culture gauloise et la société gallo-romaine. On voit ainsi comment certains éléments typiquement gaulois perdurent (traditions agricoles et religieuses, habitat rural) et d'autres subissent l'acculturation romaine (équipements, sites d'habitat...).
On admirera par exemples plusieurs objets découverts récemment et peu montrés au public, ainsi qu'une collection de monnayage gaulois assez impressionnante.


Maquette d'une ferme gauloise de l'âge du fer, entourée d'une palissade, souvent doublée d'un fossé. La Gaule était déjà à l'époque largement défrichée (quand bien même César l'appelle "chevelue", adjectif au sens peu clair) et les rendements agricoles élevés.



Fragment d'enduit peint à fresque. On ne sait rien de la décoration des maisons en torchis gauloises. En ville, ce sont les thèmes et les styles romains qui sont représentés. La romanisation a d'ailleurs commencé par les élites (pour les peuples alliés à Rome) qui se sont empressées d'imiter les modes romaines, notamment pour les maisons, malgré leur inadaptation flagrante au climat humide et froid du nord de la Gaule.




Représentation de gladiateurs romains sur une céramique sigillée. Cela montre le succès populaire des jeux romains en Gaule, où les municipalités s'équipaient d'équipements ad hoc, par exemple les "théâtres-amphithéâtres" comme ceux de Lillebonne ou de Lutèce.


Du mardi 19 mai 2009 au lundi 21 septembre 2009,
Musée départemental des Antiquités, Rouen.

présentation de l'exposition.

dimanche 7 juin 2009

Le mythe de Narcisse (ressources)

John William Waterhouse (1849-1917), Écho et Narcisse (1903), Walker Art Gallery, Liverpool

L'allusion à Narcisse

Un enfant vint mourir, les lèvres sur tes eaux,
Fontaine ! de s'y voir au visage trop beau

Du transparent portrait auquel il fut crédule...

Les flûtes des bergers chantaient au crépuscule ;

Une fille cueillait des roses et pleura ;

Un homme qui marchait au loin se sentit las.

L'ombre vint. Les oiseaux volaient sur la prairie ;

Dans les vergers, les fruits d'une branche mûrie

Tombèrent, un à un, dans l'herbe déjà noire,

Et, dans la source claire où j'avais voulu boire,

Je m'entrevis comme quelqu'un qui s'apparaît.

Était-ce qu'à cette heure, en toi-même, mourait

D'avoir voulu poser ses lèvres sur les tiennes

L'adolescent aimé des miroirs, ô Fontaine ?


Henri de Régnier, Les jeux rustiques et divins, 1897

Narcisse se regardant dans l'eau, fresque pompéienne (Maison de M. Lucretius Fronto)


Salvator Dali (1904-1989), Métamorphose de Narcisse (1937), Tate Gallery, Londres

Sur un Narcisse de marbre

fait en relief, de la main de Michel-Ange


Ce n'est ni marbre, ni porphyre,

Que le corps de ce beau chasseur,

Dont l'haleine d'un mol zéphyre

Évente les cheveux avec tant de douceur.

En cette divine sculpture,

On voit tout ce que la nature

Put jamais achever de mieux.

S'il n'entretient tout haut l'image ravissante

Que forme cette onde innocente,

C'est qu'on ne parle que des yeux,

Pour se bien exprimer sur une amour naissante.


François Tristan L'Hermite (1601-1655), La lyre

Michelangelo Merisi dit Le Caravage (1571-1610), Narcisse (1597), palais Barbérini, Rome


Narcisse dans la littérature.
documentation iconographique de Wikimédia.
fiche Wikipédia.

samedi 30 mai 2009

Retour de Ségovie

La ville de Ségovie présente une succession fascinante d'époques architecturales : époque romaine, style roman qui s'est maintenu très tardivement (XVIe siècle), époque musulmane qui combinait les styles propres aux trois communautés religieuses (musulmans, juifs et chrétiens), style mujedar, renaissance...

Mais attardons-nous sur le monument le plus impressionnant (et le plus ancien) : l'aqueduc romain.
Celui-ci domine littéralement la ville et est très imposant puisqu'il est construit en partie à flanc de colline et surplombe le cours d'eau qui contourne en contrebas la ville.
Cet aqueduc a été construit pour les besoins de l'armée romaine, puisque la ville de Ségovie servait de cantonnement militaires aux armées qui stationnaient dans la région. La population autochtone était elle réduite. Cette construction montre bien sa destination totalement utilitaire puisque l'aspect esthétique de l'aqueduc a été nettement laissé de côté, si ce n'est quelques corniches qui rythment les arches. On voit ainsi clairement les anfractuosités pratiquées pour faciliter le levage des pierres. Celles-ci n'ont pas du tout été lissées et présentent donc des bosselages. Ces pierres ne tiennent que par l'équilibre des forces, puisque aucun mortier n'a été utilisé.
L'aqueduc mène les eaux de la rivière Acebeda, à 18 km de Ségovie (ville qui se trouve à plus de 1000 m. d'altitude, au pied de la Sierra de Guadarrama, qui connaît des neiges éternelles) et a fonctionné jusque dans les années 50, ce qui explique son excellent état de conservation.
On peut voir au-dessus du premier étage des arcades la trace d'une inscription latine, aujourd'hui réduite aux perforations qui maintenaient les tenons des lettres de bronze, qui ont disparu avec le temps. Il est possible de la reconstituer à partir des trous comme pour la Maison carrée de Nîmes (voir ce message). A. Ramirez Gallardo (1975) propose la lecture suivante :
TI CLAVDIVS PONT MAX VIII COS III TRIBVNICIA POTESTATE VIIII
IMP PP OMNIVM FECIT
D'après cette hypothèse, l'aqueduc pourrait remonter au règne de Claude c'est-à-dire aux environ de l'an 50.
On distingue aujourd'hui dans la partie centrale, en haut, une statue de la Vierge (la Virgen de la Fuencisla). Une légende locale attribue en effet la construction de l'aqueduc au diable.

illustrations 2 et 4 : J. CROS (autres : Wikipédia)

lundi 25 mai 2009

La flèche du Parthe


Vous ignorez ce qu'est un Parthe ? et pourquoi il envoie des flèches ? Pour le savoir, cliquez ici.

mercredi 13 mai 2009

Le Salon noir : Alésia

Le Salon noir, émission de France Culture sur l'archéologie, excellente quoique assez pointue, propose une émission en réécoute consacrée à Alésia (nécessite Real Player) :
Quoi de neuf à Alésia ?

vendredi 8 mai 2009

Sortie à Évreux

Les 5e3 et 4 étaient en sortie pédagogique à Évreux le jeudi 7 mai 2009. C'était aussi un voyage dans le temps puisqu'on est passé de l'époque gallo-romaine au Moyen-Age.
Le temps a été très beau, même si on a eu des doutes en partant sous le ciel gris et froid de Rouen. Passé la Seine, le temps s'est levé.

La visite s'est commencée par le beffroi de la ville qui date de la fin du XVe siècle, le seul bâtiment civil médiéval conservé. Il servait de tour de guet pour protéger la ville, qui se trouvait à la limite des terres du roi de France et des ducs de Normandie.
Le groupe s'est ensuite promené le long de l'Iton, l'un des affluents de l'Eure. Le cours d'eau traversait autrefois la ville, au milieu des maisons, avant les destructions de la guerre. On peut voir des restes de rempart et des poissons qui nagent dans l'eau peu profonde.
Direction : la cathédrale. Ce bâtiment est un véritable résumé des styles architecturaux tant il a connu d'incendies et de destructions.
On a poursuivi la visite des édifices religieux par l'église Saint-Taurin, évangélisateur d'Évreux. On a pu y voir la célèbre châsse de saint Taurin, reliquaire en or du premier évêque datant du XIIIe siècle.

Comme il commençait à faire faim, nous avons pris la direction du jardin botanique pour une petite heure de détente.
Après un petit tour du cloître des Capucins, qui est aujourd'hui une école de musique, le groupe s'est dirigé vers l'ancien évêché qui est aujourd'hui le musée d'Évreux. Comme on est arrivé un peu en avance, l'évêché était encore fermé de l'intérieur ! Une petite attente au soleil, sous le regard multi-centenaire des gargouilles de l'ancien cloître. La visite des monuments de la ville semble une suite de bâtiments religieux !
Le musée est de dimensions modestes mais les collections sont bien mises en valeur dans les bâtiments restaurés datant de la Renaissance.
Les non-latinistes ont poursuivi leur voyage à l'époque médiévale, tandis que les latinistes ont encore remonté le temps. La partie consacrée à l'Antiquité est assez impressionnante : le sous-sol du musée est en effet fermé sur un côté par le rempart d'époque gallo-romaine. On y voit même en fondation des matériaux de réemploi, comme des chapiteaux et des fûts de colonnes.
Les élèves ont donc observé les différentes vitrines à l'aide d'un petit fascicule pédagogique. Toute la vie quotidienne y est abordée. L'un des chefs-d'œuvre de la collection est sans conteste cette magnifique statue de Jupiter en bronze avec des réhauts en cuivre (lèvres, mamelons) et en argent (yeux).

A droite, on peut voir une portion du rempart d'Évreux (près de la cathédrale) qui conserve des parties de l'époque romaine : les strates de briques (très plates) alternant avec des pierres petites et bien alignées (opus mixtum) sont caractéristiques des murs romains.